Jérémy Lopez qui fait une trÚs bonne (et longue) tribune sur ce début de saison et les changements :
DĂ©tails
« Je mâexcuse par avance car je viens dâĂ©crire cela un peu confusĂ©ment. Les idĂ©es sont mĂ©langĂ©es et je suis aussi conscient quâil y manque pas mal de sujets.Jâai Ă©cris au fil de mes pensĂ©es et sans rĂ©flĂ©chir au rĂ©sultat. Câest une pĂ©riode difficile car je crois que tout le monde a peur et reste assez traumatisĂ© par le passĂ©. Tout le monde : les dirigeants, le coach, les consultants, les joueurs et mĂȘme nous, supporteurs. Les joueurs semblent un peu tĂ©tanisĂ©s. Mais nous ne sommes guĂšre plus solides. Au-delĂ mĂȘme du dĂ©bat sur le jeu et les rĂ©sultats. Je ne les dĂ©fends pas Ă©videmment câest impossible. Les supporteurs sont intelligents et savent reconnaĂźtre un bon entraĂźneur. Mais il faut un peu plus de quelques mois pour ça. Sâil nâest pas le bon entraĂźneur pour lâOL, il sera jugĂ© comme tel et vice-versa.
« Il manque un voire plusieurs leaders »
Pour moi, actuellement, la question nâest pas lĂ . Mais le dĂ©bat profond qui mâinquiĂšte le plus est de savoir si le foot français est prĂȘt Ă accueillir de nouvelles mĂ©thodes Ă©trangĂšres et en a-t-il envie ? Est-ce que les journalistes sont prĂȘts ? Est-ce que le club est prĂȘt ? Je pense que oui ( je parle du club) le reste, jâen suis moins sĂ»r. Mais surtout est-ce que le joueur type de Ligue 1 est prĂȘt ? Un joueur de Ligue 1 lorsquâil part Ă lâĂ©tranger se plie au changement, il nâa pas le choix et est obligĂ© de suivre la meute. Mais est-ce quâun groupe de 23 joueurs de Ligue 1, ensemble, est prĂȘt Ă tout changer ? En a-t-il la capacitĂ© mentale, physique et footballistique ? Et surtout, en combien de temps ? La premiĂšre erreur ou le premier risque plutĂŽt : la jeunesse. Il est important pour la politique du club dâavoir des jeunes et de les revendre ensuite⊠Mais il faut alors adapter la tactique et la mĂ©thode Ă la jeunesse. Il manque un voire plusieurs leaders. Quelquâun qui est capable dâintĂ©grer rapidement la tactique du coach et de la transmettre et la maintenir en cours de match Ă ses coĂ©quipiers. Un relais. Nous ne lâavons pas. Et câest problĂ©matique surtout quand ce manque a Ă©tĂ© ciblĂ© rapidement apparemment.
Je suis triste car ce qui semblait une force (le bouleversement total de mĂ©thode sans changer tout le staff ) devient une faiblesse. La volontĂ© que Sylvinho vienne finalement avec une seule personne est logique. Nous nous sommes dit que lâancien staff fera le relais, le lien entre les joueurs et Sylvinho et lui apportera sa connaissance aussi de lâeffectif. Ăa ne semble pas ĂȘtre le cas pour lâinstant et cela devient logiquement un aveu de faiblesse. On change tout mais pas vraiment. On a le cul un peu entre deux chaises. Et a vouloir mĂ©nager un peu tout le monde, on ne mĂ©nage personne. Ce que je dis nâest pas une attaque. Jâai Ă©tĂ© le premier Ă penser que cela pouvait ĂȘtre une bonne idĂ©e sans penser au mauvais cĂŽtĂ© de la chose. Peut-ĂȘtre que cela peut fonctionner et que ça va fonctionner de mieux en mieux.
« Le pouvoir donné aux joueurs est trop grand »
Mais aprĂšs rĂ©flexion, je me pose cette question : est-ce que les joueurs sont plus aptes Ă imprimer une mĂ©thode totalement diffĂ©rente dâun coach, quand celui-ci est entourĂ© de tout son staff et devient donc le rĂ©fĂ©rent numĂ©ro 1 ? Ou alors Ă lâinverse avec un coach, certes charismatique, mais entourĂ© de tout un staff dĂ©jĂ familier des joueurs et qui peut les garder dans un confort familial mais un peu routinier et liĂ© au passĂ©. TrĂšs franchement, je nâai pas la rĂ©ponse. Jâai entendu ça et lĂ que le club nâavait jamais de son histoire travaillĂ© aussi fort tactiquement. Câest peut-ĂȘtre lĂ aussi que se trouve la rĂ©ponse. Personne nâest habituĂ©, les joueurs semblent dĂ©sorientĂ©s et ça ne se fait pas en un jour. Cependant, je suis sĂ»r dâune chose, câest quâil faut cesser dâĂȘtre poli, cesser de sâexcuser. Je pensais que cela allait changer mais, vu de lâextĂ©rieur, ça ne semble pas ĂȘtre le cas. Je pense Ă cette confĂ©rence de presse ou Juni parle de Tousart et dĂ©crit son jeu. Il a dit la vĂ©ritĂ©. Je suis dâaccord Ă 100 % sur ce quâil a dit et je dĂ©fie quiconque de me dire le contraire. Sa parole Ă©tait ferme et juste. Câest devenu une affaire et câest limite si Juni nâa pas dĂ» se justifier et retirer ses propos. Le pouvoir donnĂ© aux joueurs est trop important et surtout disproportionnĂ©. Jâaime beaucoup Tousart mais nous ne parlons pas du pilier du club non plus. Stop aux excuses.
Cette adaptation est longue et peu encourageante câest une Ă©vidence, mais le problĂšme, câest que le changement arrive peut-ĂȘtre un peu (trop) tard. Et quâil aurait dĂ» avoir lieu il y a dĂ©jĂ un an au moins. Le temps dâadaptation de TOUT le club sâen trouve fatalement un peu plus long. Et peut-ĂȘtre que beaucoup de choses se sont cristallisĂ©es au club et que ça prendra du temps. Beaucoup de temps. Et que le club Ă©tait peut ĂȘtre plus malade que je le pensais Ă lâĂ©poqueâŠdans les habitudes du moins. Il me semble aussi, je peux me tromper, que le coach et Juninho ne sâattendaient pas Ă un tel chantier. De lâampleur du travail Ă faire sur les joueurs. La mentalitĂ©, la maturitĂ©, le travail tactique, le QI foot etc⊠Et sans doute quâil a fallu plus que quelques semaines pour le rĂ©aliser. Et que dans la panique, Sylvinho a tentĂ© de boucher les trous, fermer un peu tout Ă double tour pour ne pas sombrer trop vite et sauver les meubles. Il a peut ĂȘtre mis « son football » de cĂŽtĂ© Ă ce moment-lĂ en espĂ©rant le retrouver plus tard une fois que tout sera rebĂąti de derriĂšre. Ce qui expliquerait la frilositĂ© de nos 6 premiers matchs. Le pressing offensif du dĂ©but a fait place Ă un jeu inoffensif et un peu Ă reculons.
« Le serpent qui se mord la queue »
Câest ce qui me fait dire que nous nâavons pas encore vu le vrai Sylvinho et quâil est un peu en apnĂ©e, obligĂ© de travailler sur nos faiblesses avant de travailler sur nos qualitĂ©s. Câest le problĂšme majeur de notre Ă©quipe. Les faiblesses sont beaucoup plus importantes que les qualitĂ©s. Et quâĂ force de vouloir corriger ces faiblesses , nous nâavons plus le temps de jouer sur nos qualitĂ©s. Câest le serpent qui se mord la queue. Câest le travail de lâentraĂźneur me direz-vous. Mais je ne critiquerai pas Sylvinho ici. Jâai mes avis, mais jâai attendu 3 ans et certaines circonstances avant dâĂ©crire sur lâancien entraĂźneur. LĂ , ce nâest pas le sujet.
Contre le PSG par exemple les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, nous Ă©tions un peu « bordĂ©lique », beaucoup sur lâenvie et ça donnait parfois des exploits individuels hasardeux mais de bonnes surprises. Dimanche dernier, câĂ©tait lâinverse. Nous Ă©tions devenus une Ă©quipe logique, consciente de nos faiblesses et donc ultra frileuse et peu focalisĂ©e sur la crĂ©ation. Cette conscience, absente auparavant, est devenue accrue cette saison. Câest bon signe. Mais nous avons surtout conscience de nos faiblesses et cela nous empĂȘche de jouer. Mais câest ce qui me fait penser aussi quâil faut un peu plus de temps. Jâai la sensation que les joueurs Ă©taient tellement habituĂ©s Ă ĂȘtre en roue libre sur le terrain que maintenant ils ne savent pas aller dâun point A Ă un point B sur le terrain sans ĂȘtre scolaire et en gardant leur libertĂ© crĂ©atrice. Câest comme au thĂ©Ăątre si des acteurs pendant des annĂ©es font ce quâils veulent sur scĂšne et subitement se retrouvent avec un metteur en scĂšne trĂšs exigeant et pointilleux. Les consignes se transforment alors pour eux en contrainte.
« Ne lùchons rien »
Dans le bon comme dans le moins bon. Nous ne devons pas nous enflammer. Nous ne sommes quâen septembre. Il y a un mois, jâĂ©voquais ironiquement lâidĂ©e de rĂ©Ă©crire une tribune car tout Ă©tait trop beau. Jâai bien fait de me retenir. Gardons-nous dâattaquer le club et le coach de toutes parts. Les leçons du passĂ©, je crois, sont retenues et si les choses ne vont pas ou empirent, Juninho et JMA prendront les dĂ©cisions nĂ©cessaires. Jâai une confiance totale en eux. Cessons aussi de comparer les entraĂźneurs. Si un coach est faible, il est faible. Il ne doit pas ĂȘtre jugĂ© par rapport Ă un autre. La faiblesse de lâun ne donne pas de force Ă lâautre. Cela marche dans les deux sens. Jâai envie de dire aussi ce qui a changĂ© et qui va bien. HĂ©las, cela concerne moins le terrain en ce moment mais câest dĂ©jĂ Ă©norme et câest Ă souligner. Le rapport aux supporteurs a changĂ©. Je trouve quâil sâest resserrĂ© et câest important. Je vois de lâĂ©coute, du respect et une transparence sur les faits que je trouve trĂšs belle et positive pour le futur. Les choses sont dites. Le club ne nous dit plus que nous sommes incroyables quand nous ne le sommes pas. Et il nây a plus personne Ă dĂ©fendre. La seule chose Ă dĂ©fendre câest le club maintenant. Les choses sâarrangent beaucoup plus vite quand elles sont dites sincĂšrement.
Je veux croire au projet. Je veux aussi dire quâil Ă©tait important de passer Ă quelque chose de nouveau. Que ces changements lĂ sont des changements Ă long terme. Et que si ils doivent nous faire vivre une pĂ©riode difficile mais nĂ©cessaire , je suis sĂ»r que ça prendra. La seule peur que jâai, si un jour, il sâavĂšre que ça ne fonctionne pas, câest que le club fasse marche arriĂšre. Certains seraient ravis dâavoir un bon vieux coach de Ligue 1 qui connaĂźt bien le championnat (jâai une dizaine de noms en tĂȘte), moi pas. LâOL doit sâenrichir de football. De gens diffĂ©rents. De mĂ©thodes autres. Ne reculons pas, ne tombons pas dans le corporatisme de ceux qui aiment plus leur personne ou leurs amis que leur club. Ne retombons pas dans nos travers Ă la premiĂšre difficultĂ©. Le risque Ă©tait immense. Il faut le saluer. Et ne lĂąchons rien. Nous ne sommes quâen septembre. Sylvinho a commencĂ© le travail, il y a deux mois et demi seulement. Souvenons-nous aussi du match Ă Nantes en avril (12 avril 2019, 2-1). A cette pĂ©riode, tout le monde se disait ,Ă juste titre, que le chantier Ă©tait Ă©norme et quâil nous faudra beaucoup, beaucoup de temps pour nous relever. Et bien nous y sommes. »
Sachant que câest ce mĂȘme mec qui avait fait bouger de nombreuses choses en avril dernier avec une tribune bien critique et trĂšs bien Ă©crite. Aulas avait dĂ©cidĂ© de le rencontrer en personne et aprĂšs une longue entretenue les rapports avec les supporters avaient considĂ©rablement changĂ©s.